Le lipofilling mammaire est-il adapté à toutes les femmes ? Le Dr Philippe Legaillard, chirurgien esthétique, exprime un avis mesuré sur cette technique chirurgicale, présentée comme une alternative à la pose d’implants mammaires. Selon ce spécialiste de l’augmentation mammaire, le lipofilling des seins est une fausse bonne idée dans la grande majorité des cas. Il explique quels en sont les limites, les risques et les indications réelles.
Qu’est-ce que le lipofilling mammaire ?
Le lipofilling des seins ou lipostructure mammaire consiste à aspirer la graisse sur une partie du corps de la patiente (par exemple le ventre ou les cuisses), puis à la réinjecter dans les seins pour augmenter leur taille.
En ce qui concerne la chirurgie esthétique, il arrive très fréquemment que des patientes qui sont un peu enrobées me demandent de se servir de cette graisse pour augmenter le volume de leurs seins.
A première vue, cette technique d’augmentation mammaire semble attrayante pour deux raisons :
- Faire une pierre deux coups, autrement dit maigrir là où en a besoin et grossir là où on le souhaite, en une seule opération.
- Ne pas risquer de rejet ou de rupture de prothèse car on n’utilise pas de produits synthétiques, mais la graisse autologue de la patiente.
Pourquoi le lipofilling mammaire n’est-il pas toujours indiqué ?
Il y a en effet plusieurs choses qu’il faut savoir sur cette greffe de graisse.
La graisse disponible n’est pas toujours suffisante
Tout d’abord, la qualité de la graisse et son traitement sont des éléments majeurs du résultat. Il est bien rare qu’il ne faille pas s’y reprendre plusieurs fois pour obtenir un résultat satisfaisant.
Il faut avoir conscience qu’une augmentation mammaire moyenne en France est de l’ordre de 300 cc par sein, soit 600 cc pour deux seins. Ce qui veut dire qu’il faut prélever environ 1,5 litre de graisse. En effet, cette graisse est filtrée, traitée. Donc on en dispose d’à peu près deux-tiers de moins.
Ensuite, il faut tenir compte du résultat à 1 an. Si on a injecté 300 cc dans chaque sein, ce qui est le résultat souhaité par exemple, à peu près la moitié a disparu au bout d’un an. Donc on doit en réinjecter une nouvelle fois.
Les limites liées à la prévention du cancer du sein
La deuxième chose qui est très importante et dont les femmes n’ont pas conscience parfois, surtout les femmes jeunes, c’est qu’elles vont vivre, qu’elles vont avoir des enfants, que leurs seins vont changer.
Vous pouvez me dire que, avec des prothèses mammaires, c’est la même chose. Non, il y a un élément fondamental qui est différent, c’est la prévention du cancer du sein.
Le lipofilling ne donne pas un cancer du sein, c’est évident, mais il est contre-indiqué dans les antécédents familiaux de cancer du sein parce qu’il stimule la quantité d’œstrogène dans le sang.
Il faut savoir que, lorsqu’on injecte de la graisse, une partie non négligeable des cellules graisseuses, qu’on appelle les adipocytes, se nécrose. Cela n’a rien de pathologique, c’est un processus naturel. En revanche, cela laisse toujours des calcifications ou des microcalcifications qui sont des signes du cancer. Donc on peut se retrouver avec des femmes de 40-45 ans qui présentent des calcifications lors de mammographie suite à un lipofilling. Ce qui gêne le diagnostic : cancer ou pas cancer ?
Dans quels cas le lipofilling des seins est-il vraiment indiqué ?
Cependant, dans certaines situations, dans certains morphotypes, je garde cette indication.
Reconstruction mammaire après masectomie
Le lipofilling du sein est essentiellement indiqué dans le cas de reconstruction mammaire après un cancer. C’est là où il y a le plus d’indications. Lorsqu’il y a eu une ablation partielle du sein, il est possible de redonner du volume par injection de graisse.
Lipofilling mammaire en complément d’un implant
Seconde indication très intéressante dans la lipostructure du sein, c’est lorsque des femmes auxquelles on a posé des implants mammaires souhaitent harmoniser ce qu’on appelle le segment 1, c’est-à-dire la pente au-dessus du sein. Là effectivement une technique couplée peut améliorer grandement le résultat. Elle consiste à associer la mise en place d’un implant mammaire rétromusculaire avec un lipofilling de la partie supérieure des seins.
Voilà pourquoi je ne choisis pas le lipofilling des seins en règle générale. Je préfère pratiquer l’augmentation mammaire par implant ou prothèse mammaire. J’utilise le lipofilling plutôt dans le cadre de la lipostructure du visage.
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